Un réveil tardif mais déjà spectaculaire
Longtemps cantonné au rang de disciple timoré du tennis, le padel n’a véritablement émergé en France qu’à la fin de la décennie 2010. Si Toulouse avait inauguré la première Coupe du Monde en 2000, le sport est demeuré discret face au rugby et au football. Ce n’est qu’après 2015, quand des clubs de tennis et des centres privés ont installé leurs premiers courts, que la pratique a franchi un palier. L’impulsion décisive est venue du soutien de la Fédération Française de Tennis (FFT), qui a intégré le padel à sa structure, lancé des formations de moniteurs et organisé des tournois officiels.
Facteurs clés du développement
Plusieurs éléments scientifiques expliquent l’accélération actuelle :
Accessibilité technique : le padel se maîtrise rapidement, avec un apprentissage des gestes de base (bandeja, vibora, smash) réalisable en moins de 10 heures d’entraînement.
Dimension sociale : la taille du court (20 × 10 m) et le format en double favorisent l’interaction et maintiennent un temps effectif de jeu de 65 % par match.
Infrastructure en expansion : des entreprises spécialisées, majoritairement espagnoles, déploient des courts modulaires en verre feuilleté et gazon synthétique, adaptés au climat français.
Efficacité FFT : diffusion de 120 certifications de formateurs chaque année, création de ligues régionales et subvention directe jusqu’à 30 % du coût d’un court.
Comparaison chiffrée avec l’Espagne
Selon le Global Padel Report 2025 :
On dénombre plus de 50 000 courts de padel dans le monde, soit cinq fois plus qu’en 2016.
L’Espagne reste leader incontesté avec près de 20 000 courts et plusieurs millions de pratiquants.
La France, débutant sa phase d’expansion il y a seulement dix ans, compte aujourd’hui plusieurs milliers de courts, avec un taux de croissance annuel moyen estimé à 25 %.
Cette différence de maturité se traduit par un maillage plus dense en Espagne (1 terrain pour 2 500 habitants environ) contre un ratio de 1 pour 6 000 en France. L’objectif des fédérations locales est de ramener ce ratio à 1/4 000 d’ici 2028.
Enjeux et défis structurels
Pour consolider cette dynamique, la France doit surmonter plusieurs défis :
Concurrence sportive : le padel doit se positionner face au tennis (2 000 000 de licenciés) et au football (2 200 000 de licenciés) en justifiant son attractivité spécifique.
Formation des encadrants : la qualité pédagogique des moniteurs reste hétérogène. Seule une harmonisation des cursus (45 heures minimum de formation) garantira un enseignement homogène.
Équilibre offre–demande : éviter la création excessive de courts en zones déjà saturées (Île-de-France, Côte d’Azur) pour prévenir les fermetures anticipées pour manque de fréquentation.
Opportunités stratégiques à exploiter
Plusieurs leviers peuvent être activés :
Conversion des clubs de tennis : installation de courts annexes et proposition de formules mixtes tennis/padel pour fidéliser la clientèle.
Tourisme sportif transfrontalier : structuration de packages « stage padel + découverte » à destination des Belges, Suisses et Britanniques.
Événements éphémères : mise en place de courts temporaires sur des sites emblématiques (Champ-de-Mars, Place Bellecour) pour capter l’attention médiatique et attirer de nouveaux publics.
Projections et impact sur la performance
Les modèles de prédiction basés sur la croissance en Espagne prévoient :
Un doublement du nombre de licenciés en France d’ici 2027, grâce à une densification à l’échelle des écoles et universités.
Une hausse de 35 % des infrastructures indoor afin d’assurer une pratique toute l’année, quel que soit le climat.
Un rehaussement global du niveau national, mesuré par la création d’un circuit pro de 8 à 10 tournois annuels, comparable au World Padel Tour.
Au plan individuel, les joueurs bénéficieront d’une offre de formation plus étoffée, avec des programmes scientifiques intégrant l’analyse vidéo, le tracking des frappes et un travail biomécanique sur la gestuelle.
La France au seuil d’une consécration européenne
En consolidant son réseau de courts, en professionnalisant la formation et en entretenant un précieux écosystème événementiel, la France se donne les moyens de passer du statut d’outsider à celui de locomotive du padel européen. Les prochains mois seront déterminants : le maintien d’une croissance à deux chiffres et l’accueil de tournois internationaux constitueront les indicateurs clés de ce basculement sportif.